
Le général Abdourahamane Tiani, ancien chef de la garde présidentielle du Niger, a pris le pouvoir de manière autoritaire le 26 juillet 2023, après un coup d’État militaire qui a renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum. L’annonce de sa prise de pouvoir a provoqué des remous à l’échelle nationale et internationale, ravivant des débats sur la légitimité et les conséquences d’une telle action.
L’Auto-proclamation : Une décision Contestée
Le 28 juillet 2023, Tiani s’autoproclame président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), arguant de la dégradation de la situation sécuritaire et de la mauvaise gouvernance du régime de Bazoum. Cette action, bien qu’ayant trouvé un certain écho au sein de l’armée et de certaines fractions de la population, a suscité une large opposition au sein des partisans de la démocratie. Les analystes politiques s’interrogent sur les motivations du général Tiani, certains y voyant une tentative de consolidation de pouvoir par les militaires au détriment des principes démocratiques. Le professeur Moussa Toudou, spécialiste en sciences politiques et en gouvernance africaine, a souligné dans une interview que “l’auto-proclamation d’un dirigeant militaire sans l’aval populaire constitue une grave entorse à l’ordre constitutionnel, et compromet les acquis démocratiques.”
La Transition : Un Mandat Contesté
Depuis sa prise de pouvoir, le général Tiani a mis en place une transition politique. Un gouvernement de transition a été formé avec Ali Lamine Zeine nommé Premier ministre. Des assises nationales ont été organisées en février 2025, où Tiani a été désigné président de la République pour un mandat de cinq ans, renouvelable. Cependant, les observateurs internationaux, dont le professeur Mohamed Fadhel, expert en relations internationales et en droit constitutionnel, ont fait remarquer que “bien que la situation sécuritaire soit précaire, l’auto-proclamation du général Tiani nuit à la crédibilité des transitions en Afrique, et fragilise les efforts pour restaurer une gouvernance démocratique.”
L’arrivée au pouvoir de Tiani ne se fait pas sans heurts. Selon le journaliste et analyste politique Sékou Traoré, “l’instabilité au Niger n’est pas uniquement le fait des militaires mais aussi d’une gouvernance mal adaptée aux défis complexes du pays.” Ce constat résonne comme une critique implicite des forces militaires qui, à défaut d’un consensus populaire, prennent la relève en toute illégitimité.
Une Présence Russe qui Interpelle
L’évolution de la situation politique au Niger a également attiré l’attention internationale, notamment en raison du soutien présumé de la Russie à la junte. Les experts soulignent que le groupe Wagner, actif en Afrique, pourrait avoir joué un rôle dans cette évolution politique, ce qui n’a pas manqué de soulever des inquiétudes quant à une influence croissante de Moscou sur les affaires internes du Niger et de l’Afrique de l’Ouest. Dans un article publié par Le Monde, l’analyste François-Xavier Giauque a noté que “l’extension de l’influence russe en Afrique se fait souvent au détriment des principes démocratiques, en soutenant des régimes militaires comme celui du général Tiani.”
Un Avenir Incertain
La situation au Niger reste volatile et incertaine. Tiani a promis un dialogue national, mais le scepticisme persiste quant à la capacité du gouvernement militaire à naviguer les turbulences internes et à répondre aux attentes de la population. Comme l’a déclaré le politologue nigérien Abdoulaye Alhassane, “le véritable défi du général Tiani sera de convaincre la population de son engagement à restaurer une gouvernance démocratique et inclusive, tout en répondant aux préoccupations liées à la sécurité nationale.”
Conclusion
Le général Abdourahamane Tiani, en s’autoproclamant président et en prenant les rênes d’une transition controversée, s’est retrouvé à la tête d’un Niger profondément divisé. Bien que la situation sécuritaire ait justifié, dans une certaine mesure, la prise de pouvoir par l’armée, la méthode utilisée a révélé des tensions qui risquent de fragiliser encore plus la stabilité du pays. La communauté internationale, tout en observant attentivement ces développements, attend des garanties de la part du régime militaire sur le respect des principes démocratiques et des droits humains. L’avenir du Niger dépendra en grande partie de la capacité du général Tiani à apaiser les tensions internes et à gérer la transition vers un retour à un ordre constitutionnel stable.
Les propos des experts et des analystes continueront d’alimenter le débat sur les risques de militarisation des politiques africaines et sur la nécessité de préserver les acquis démocratiques face aux défis sécuritaires.
Imam chroniqueur