
Du 10 au 12 avril 2025, la ville de Thiès a vibré au rythme des livres, accueillant la 7ᵉ édition du Salon International du Livre de Thiès (SILTH). Cet événement majeur, désormais inscrit dans le calendrier culturel du Sénégal, a une nouvelle fois mis la littérature au cœur des préoccupations de la ville et du pays. Organisé par l’écrivain et éditeur Moustapha Ndéné Ndiaye, le salon a réuni des écrivains, des éditeurs, des chercheurs, des étudiants, ainsi qu’un large public, autour du thème de cette édition : “L’Écriture Mémorielle : Des Vérités à la Réconciliation.”
Retour aux Sources et Ouverture Internationale
Après avoir fait une pause à Saly-Portudal en 2024 avec l’écrivain Boubacar Boris Diop comme parrain, cette année, le salon est revenu à Thiès, dans le cadre symbolique de la Promenade des Thièssois, un lieu de culture en plein cœur de la ville. Le parrain de cette édition, le Pr Ibrahima Thioub, ancien recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, a salué l’initiative de ce salon, soulignant l’importance de la littérature dans la construction de la mémoire collective et dans le processus de réconciliation sociale.
Le SILTH 2025 a aussi ouvert ses portes à des auteurs et éditeurs venus de pays voisins comme la Côte d’Ivoire et le Mali, ce qui a permis de créer un véritable carrefour d’échanges littéraires entre les cultures africaines. Cette ouverture internationale a contribué à renforcer les liens littéraires entre les pays et à mettre en lumière la richesse des productions littéraires africaines.
Un Thème Pertinent : “L’Écriture Mémorielle : Des Vérités à la Réconciliation”
Le thème de l’année, “L’Écriture Mémorielle : Des Vérités à la Réconciliation”, a été choisi pour susciter une réflexion sur le rôle crucial de l’écriture dans le processus de réconciliation après les traumatismes historiques. Ce choix thématique a trouvé un écho particulier dans le contexte sénégalais, où la question de la mémoire, des injustices passées et de la construction d’une identité commune est au cœur du débat public. Les écrivains et chercheurs ont ainsi échangé sur la manière dont la littérature peut contribuer à guérir les blessures du passé, notamment en traitant de l’héritage colonial, de l’esclavage et des conflits sociaux.
La table ronde sur “La Littérature et la Réconciliation”, animée par plusieurs intellectuels et auteurs engagés, a permis aux participants de réfléchir sur la manière dont les écrivains peuvent participer à la réécriture de l’histoire collective à travers leurs œuvres. L’écrivain ivoirien Venance Konan, lors de cette session, a évoqué l’importance de l’écriture dans la gestion de la mémoire post-coloniale, en soulignant que “la réconciliation passe par la vérité, et la vérité doit être portée par l’écriture”.
Un Programme Riche et Varie
Le programme de cette édition a été à la hauteur des attentes, avec des activités diversifiées qui ont capté l’attention de tous les publics. Les conférences et tables rondes ont été suivies par des milliers de spectateurs qui ont pu écouter des experts et des écrivains sur des sujets aussi variés que l’édition numérique en Afrique, la place de la littérature jeunesse et la question de la mémoire dans les sociétés africaines. Le panel sur “Les défis de l’édition numérique en Afrique” a attiré un grand nombre de jeunes écrivains et éditeurs, désireux d’apprendre à naviguer dans le monde numérique pour diffuser leurs œuvres au-delà des frontières africaines.
Parallèlement, plus de quarante éditeurs locaux et internationaux ont présenté leurs ouvrages à un public de plus en plus exigeant. Des livres de fiction, des récits historiques, des essais philosophiques et des ouvrages pour la jeunesse ont été exposés. Les visiteurs ont pu découvrir des écrivains émergents mais aussi des figures de proue de la littérature africaine.
La Place des Jeunes au Salon
Le SILTH 2025 a mis un accent particulier sur la jeunesse, avec plusieurs ateliers de création littéraire destinés aux jeunes talents. Les élèves et étudiants de la région de Thiès ont pu participer à des ateliers pratiques animés par des auteurs confirmés. Ces ateliers ont offert aux jeunes une occasion de découvrir le processus d’écriture et d’édition, tout en étant guidés par des écrivains renommés. Le salon a ainsi montré sa volonté d’encourager les nouvelles voix littéraires africaines à émerger.
L’atelier “Écrire pour la réconciliation : des outils pratiques” a été particulièrement apprécié par les jeunes écrivains, qui ont pu y développer leurs projets et bénéficier de conseils avisés de professionnels du monde littéraire. Le salon a ainsi servi de tremplin à de jeunes auteurs qui pourraient bien se faire connaître dans les années à venir.
Soutien Institutionnel et Initiatives Innovantes
Le SILTH 2025 a reçu un soutien institutionnel fort, notamment du ministère de la Culture et du Patrimoine historique. Lors de la cérémonie d’ouverture, le ministre Alioune Sow a annoncé une contribution de 10 millions de francs CFA pour la rénovation et le développement de la bibliothèque de l’Institut national d’éducation et de formation des jeunes aveugles (INEFJA) de Thiès. Cette initiative vise à améliorer l’accès à la culture pour les jeunes en situation de handicap visuel et à promouvoir l’inclusion sociale à travers la littérature.
Le ministre a également annoncé que l’Etat du Sénégal travaillait sur un projet ambitieux visant à soutenir davantage l’édition et la diffusion du livre, notamment à travers des plateformes numériques dédiées aux auteurs africains. Ce soutien gouvernemental montre l’engagement des autorités dans la promotion de la culture littéraire et l’accès aux livres pour tous.
Thiès, Capitale Littéraire du Sénégal
À travers le SILTH, Thiès s’affirme de plus en plus comme une capitale littéraire du Sénégal. La ville, qui a longtemps été associée à son passé ferroviaire, connaît une transformation culturelle profonde, avec une nouvelle génération d’artistes et d’écrivains qui contribuent à son rayonnement. Le salon est désormais un rendez-vous incontournable, qui attire des participants de tout le pays et au-delà, et donne à Thiès une visibilité internationale dans le domaine littéraire.
Le SILTH ne se limite pas à une simple exposition de livres. Il devient un lieu de réflexion, de débat et de création, où les questions sociales et politiques sont abordées à travers le prisme de la littérature. La ville de Thiès, avec son accueil chaleureux et son ambiance propice aux échanges, s’affirme comme un carrefour littéraire, où la diversité des voix et des idées peut s’épanouir.
Perspectives d’Avenir : Vers une Pérennisation du SILTH
Les organisateurs du SILTH ont exprimé leur volonté de faire de cet événement un rendez-vous annuel incontournable pour les amoureux du livre. Avec une audience croissante et une participation de plus en plus internationale, le salon se positionne comme un moteur essentiel de la scène littéraire africaine. Les responsables ont également souligné la nécessité d’inclure davantage de pays africains dans les futures éditions, en invitant des écrivains d’Algérie, du Niger, du Burkina Faso et du Tchad, afin d’élargir le champ des échanges littéraires.
Des projets sont également en cours pour améliorer les infrastructures liées au salon, notamment en prévoyant la création d’un centre de formation dédié à l’écriture et à l’édition, qui pourrait offrir des bourses d’écriture aux jeunes talents africains. Cette ambition d’institutionnalisation et de professionnalisation du SILTH pourrait en faire un modèle pour d’autres salons littéraires sur le continent.
En Conclusion : Le SILTH, Moteur de Développement Culturel à Thiès
La 7ᵉ édition du Salon International du Livre de Thiès a été un succès incontestable. Elle a renforcé la place de la ville sur la scène littéraire internationale tout en offrant aux visiteurs une programmation de haute qualité. En mettant l’accent sur l’écriture mémorielle et la réconciliation, le salon a non seulement honoré les écrivains et leurs œuvres, mais a aussi contribué à une réflexion nécessaire pour la paix sociale. La prochaine édition promet d’être encore plus ambitieuse, avec une ouverture toujours plus grande à l’international et une multiplication des initiatives en faveur de la jeunesse et de la lecture. Le SILTH est désormais un pilier de la culture sénégalaise et africaine.
Iman chroniqueur Babacar DIOP