
Dans un message royal d’une grande portée symbolique, le Roi Mohammed VI a annoncé qu’il n’y aura pas de célébration traditionnelle de l’Aïd al-Adha avec sacrifice en 2025. Cette décision exceptionnelle intervient dans un contexte marqué par une pénurie de bétail et une flambée des prix, conséquence directe de cinq années consécutives de sécheresse qui affectent durement l’agriculture et l’élevage au Maroc.
Une décision guidée par la réalité économique et environnementale
Selon le ministère de l’Agriculture marocain, les précipitations en nette diminution ont entraîné un affaiblissement considérable des pâturages et une hausse du coût des aliments pour le bétail. Le Dr. Abdelkarim El-Mansouri, économiste spécialisé en politiques agricoles, souligne que « la raréfaction des ressources fourragères a non seulement réduit l’offre de moutons, mais a également fait exploser les coûts, rendant l’accès au sacrifice inabordable pour une grande partie de la population ».
Cette situation pousse le royaume à prendre des mesures inédites pour préserver la stabilité sociale et économique. Le Dr. Fatima Zahra Benchekroun, experte en développement durable, explique que « suspendre le rituel du sacrifice cette année relève d’une gestion responsable des ressources. Cela permet de limiter la pression sur les éleveurs tout en protégeant les ménages modestes déjà touchés par l’inflation ».
Une approche conforme à la jurisprudence islamique
Sur le plan religieux, cette décision s’appuie sur des fondements solides de la jurisprudence islamique (fiqh). Le sacrifice, bien que fortement recommandé (sunnah mu’akkadah), n’est pas une obligation pour les personnes en difficulté.
Sheikh Dr. Ahmed Al-Raysouni, ancien président de l’Union Internationale des Savants Musulmans, rappelle que « l’islam repose sur la facilité et la levée des charges excessives. En période de crise, il est légitime de suspendre ou d’adapter certains rites pour préserver le bien-être collectif ».
Dans le même esprit, le professeur Abdellah Guennoun, théologien marocain de renom, souligne que « la charia repose sur la préservation des cinq objectifs majeurs : la vie, la religion, l’intellect, la descendance et les biens. Face à une telle conjoncture, renoncer au sacrifice devient un acte de sagesse et de compassion ».
Un précédent historique et un appel à la solidarité nationale
Il est important de noter que le Maroc a déjà connu des précédents similaires. En 1963, 1981 et 1996, le royaume avait suspendu le rituel du sacrifice en raison de conditions économiques difficiles et de sécheresses sévères. Ces décisions visaient à protéger le cheptel national et à alléger le fardeau financier des citoyens en période de crise.
Le message royal insiste également sur la nécessité de renforcer l’entraide entre citoyens. À ce sujet, le Dr. Rachid Abid, sociologue spécialisé dans les dynamiques sociales marocaines, explique : « Cette annonce pourrait encourager un élan de solidarité où ceux qui en ont les moyens aideront les plus démunis par d’autres formes de dons, tout en respectant l’esprit du sacrifice ».
En somme, la suspension du rituel du sacrifice de l’Aïd al-Adha en 2025 reflète une adaptation pragmatique face aux défis climatiques et économiques. Loin de remettre en cause les traditions religieuses, cette décision s’inscrit dans une vision plus large de préservation de l’équilibre national et de protection des plus vulnérables.
Iman chroniqueur babacar DIOP