Bruxelles, scène d’un face-à-face discret : Tshisekedi interpelle Kagamé sur la guerre de l’est congolais

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Bruxelles, scène d’un face-à-face discret : Tshisekedi interpelle Kagamé sur la guerre de l’est congolais

Le président de la République démocratique du Congo, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a profité de sa prise de parole au Global Gateway Forum de Bruxelles pour adresser, devant témoins, un message direct à son homologue rwandais Paul Kagamé.


Dans un ton calme mais ferme, il a lancé un appel à la paix, dénonçant la poursuite des affrontements dans l’est du pays et la responsabilité présumée du Rwanda dans le soutien au M23, groupe armé actif depuis plus d’une décennie.

« J’ai vu le président du Rwanda. C’est de lui que je parle. Je lance un appel à la paix, à tous, comme témoins. Arrêtons cette escalade. Faites arrêter les troupes du M23, qui ont été soutenues par votre pays. Cela a tué des milliers de personnes, des millions au fil des ans. L’histoire sera notre juge. Il est temps de changer », a déclaré Félix Tshisekedi.

Paul Kagamé, présent dans la salle, est resté silencieux.
Mais ce silence, lourd de sens, a donné à cette scène une portée géopolitique inattendue : celle d’un face-à-face feutré entre deux dirigeants que tout oppose, mais dont les peuples réclament la paix.

Depuis la fin des années 1990, les relations entre Kinshasa et Kigali oscillent entre méfiance et hostilité.
Le territoire congolais, riche en minerais stratégiques, abrite depuis des décennies une mosaïque de groupes armés, dont certains selon plusieurs rapports onusiens bénéficieraient d’un appui logistique ou militaire venu du Rwanda.

Le mouvement rebelle M23, né d’une mutinerie d’anciens soldats tutsi intégrés dans l’armée congolaise, illustre ces tensions.
Vaincu en 2013, il a refait surface en 2021, reprenant plusieurs localités de l’est congolais, poussant des centaines de milliers de civils sur les routes de l’exil.
Les efforts diplomatiques du processus de Nairobi à celui de Luanda n’ont pas suffi à enrayer la spirale de violence.

Le choix du lieu n’est pas anodin. En lançant cet appel depuis Bruxelles, cœur politique de l’Union européenne, Félix Tshisekedi cherche à internationaliser la cause congolaise et à replacer la question sécuritaire dans le débat mondial sur les investissements et la stabilité en Afrique.

Kinshasa estime qu’aucune croissance durable n’est possible sans la fin du soutien étranger aux groupes armés.
Derrière cet appel, se joue aussi une bataille diplomatique : celle de la crédibilité.
Tshisekedi, à un an de la fin de son mandat, veut convaincre que la RDC ne se contente plus d’être victime d’une guerre d’usure, mais entend imposer un cadre clair de responsabilité régionale.

La RDC a récemment refusé de signer un accord économique régional négocié à Washington, en signe de désaccord avec certaines clauses jugées contraires à sa souveraineté.
Ce refus illustre un durcissement de la position congolaise face à ce qu’elle perçoit comme une diplomatie de façade.
Pour Kinshasa, il ne suffit plus de multiplier les conférences de paix : il faut que les engagements soient suivis d’effets sur le terrain, notamment par le retrait effectif des forces rwandaises et la neutralisation du M23.

Pendant ce temps, les combats se poursuivent dans les territoires de Rutshuru et Masisi, tandis que les populations civiles demeurent les premières victimes.
Les ONG dénoncent une catastrophe humanitaire silencieuse : plus de sept millions de déplacés internes selon les Nations unies.

L’appel de Tshisekedi à Bruxelles pourrait marquer un tournant, à condition qu’il s’accompagne d’un engagement diplomatique coordonné.
La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), à travers sa mission militaire déployée sur le terrain, tente d’assurer un fragile équilibre.
Mais sans coopération sincère du Rwanda, cette stabilisation restera illusoire.

La paix durable dans les Grands Lacs exige aujourd’hui :

* une retraite effective des forces étrangères du sol congolais,

* une vérification indépendante des cessez-le-feu,

* la participation active des communautés locales aux processus de réconciliation,

* et un suivi international plus ferme sur les flux d’armes et de minerais.

En s’adressant directement à Paul Kagamé depuis une tribune européenne, Félix Tshisekedi a rompu avec la diplomatie feutrée habituelle de la région.
Mais un discours, aussi courageux soit-il, ne suffira pas à rétablir la paix.
Il faudra désormais des actes concrets, une volonté politique partagée et un engagement régional sincère pour que les peuples du Kivu cessent enfin d’être les otages d’une guerre sans fin.

Rédaction : Celine Dou

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