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Arabie saoudite : Des domestiques africaines piégées dans un enfer moderne

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Arabie saoudite : Des domestiques africaines piégées dans un enfer moderne

Des milliers de femmes africaines, parties en quête d’un avenir meilleur, se retrouvent aujourd’hui piégées dans l’enfer de l’exploitation domestique en Arabie saoudite. Abusées, maltraitées et privées de leurs droits les plus fondamentaux, elles sont victimes d’un système qui les considère comme de simples marchandises. Une récente enquête du New York Times révèle l’ampleur d’un commerce lucratif impliquant des élites africaines et saoudiennes.

Un cri de détresse ignoré

Le mois dernier, quatre jeunes Ougandaises en uniforme de domestique ont envoyé une vidéo d’appel à l’aide à une organisation humanitaire. Dans l’enregistrement, elles affirment être détenues contre leur gré depuis six mois en Arabie saoudite. « Nous sommes épuisées d’être retenues contre notre volonté », implore l’une d’elles, visiblement à bout de forces.

Leur calvaire met en lumière un réseau bien établi qui exploite la vulnérabilité de nombreuses jeunes femmes africaines. L’entreprise qui les a envoyées à l’étranger appartient à Sedrack Nzaire, un responsable politique influent en Ouganda, identifié dans les médias locaux comme le frère du président Yoweri Museveni.

Un trafic orchestré depuis l’Afrique

Chaque année, des milliers de femmes en provenance d’Ouganda, d’Éthiopie, du Kenya et de Sierra Leone sont recrutées par des agences qui leur promettent des emplois bien rémunérés au Moyen-Orient. Mais une fois sur place, elles découvrent une réalité cauchemardesque : confiscation de passeports, journées de travail interminables, abus physiques et sexuels, non-paiement des salaires… Nombre d’entre elles ne reverront jamais leur pays.

Les agences de recrutement, souvent liées à des personnalités influentes, jouent un rôle clé dans ce système d’exploitation. En Ouganda, le cas de Sedrack Nzaire soulève une indignation particulière : alors que son entreprise continue d’envoyer des travailleuses à l’étranger, des centaines de jeunes femmes croupissent dans des centres de détention saoudiens, abandonnées par leurs employeurs et sans aucun soutien de leur pays d’origine.

Le système de kafala : un piège sans issue

En Arabie saoudite, le système de kafala (parrainage) place les travailleurs étrangers sous la totale dépendance de leurs employeurs. Ces derniers contrôlent non seulement leur droit de travailler, mais aussi de quitter le pays. Toute tentative de fuite est considérée comme une infraction, exposant les domestiques à des arrestations arbitraires et des expulsions brutales.

Fatoumata, une domestique sierra-léonaise, témoigne : « Mon employeur m’a enfermée pendant des mois. Il ne me payait pas et me battait quand je me plaignais. » Après plusieurs tentatives désespérées, elle a fini par s’évader et se cacher avant d’être rapatriée par une ONG.

Complicités et impunité

Malgré les multiples témoignages d’abus, peu d’actions sont prises pour protéger ces travailleuses. Les gouvernements africains, loin de dénoncer ces pratiques, continuent de signer des accords de main-d’œuvre avec l’Arabie saoudite, facilitant ainsi ce commerce humain moderne.

Dans certains cas, des personnalités influentes profitent directement de ce système. En Ouganda, le silence des autorités face aux accusations contre Sedrack Nzaire suscite des interrogations. En parallèle, les familles des travailleuses exploitées attendent des réponses et réclament justice.

Vers un changement ?

Face à l’indignation croissante, des organisations de défense des droits humains appellent à une réforme urgente du système de kafala et à une plus grande surveillance des agences de recrutement. Mais tant que ces pratiques resteront rentables pour les élites africaines et saoudiennes, le sort des domestiques africaines risque de ne pas changer.

Pour l’instant, ces femmes continuent de voir leurs rêves se briser dans un pays qui, pour elles, n’a été que souffrance et désillusion.

Imam chroniqueur Babacar DIOP

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