Beauté, santé et dignité : ne laissons pas le « khessal » ternir l’élan d’Octobre rose

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Beauté, santé et dignité : ne laissons pas le « khessal » ternir l’élan d’Octobre rose

Par Imam chroniqueur Babacar Diop

Chaque mois d’octobre, le Sénégal, à l’unisson du reste du monde, se pare de rose pour rappeler l’urgence de la lutte contre les cancers féminins. Au-delà du symbole, Octobre rose incarne une promesse : celle de la vie, de la dignité et du courage féminin face à la maladie.

Grâce à la Ligue sénégalaise contre le cancer (LISCA), les campagnes d’autopalpation et de dépistage ont permis à de nombreuses femmes de comprendre qu’un cancer détecté à temps n’est pas une condamnation, mais une épreuve qui peut être vaincue.
Selon la Professeure Mame Daro Fall, oncologue au CHU Aristide Le Dantec, « le cancer du sein représente près de 33 % des cancers diagnostiqués chez la femme sénégalaise, et 60 % des cas sont découverts à un stade avancé » (Revue sénégalaise de cancérologie, 2023, p. 45).

Les marches, les conférences et les séances de dépistage gratuites ont réveillé les consciences et redonné de la visibilité à une maladie longtemps taboue. L’annonce par le président Bassirou Diomaye Faye de la création d’un Centre national de dépistage marque une étape historique dans la démocratisation de l’accès à la prévention.

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Entre avancées et désespoirs silencieux

La gratuité de la chimiothérapie pour les cancers du sein et du col de l’utérus dans le secteur public, décidée en 2019, demeure une avancée majeure. Cependant, comme le rappelle la Dr Khoudia Sow, oncologue à l’hôpital Dalal Jamm, « la gratuité partielle ne suffit pas : la radiothérapie, la chirurgie et certains médicaments essentiels restent inaccessibles à des milliers de femmes » (Les défis de l’oncologie en Afrique de l’Ouest, L’Harmattan, 2022, p. 112).

Pour beaucoup, la lutte s’interrompt non pas à cause de la maladie, mais faute de moyens. Une injustice que Babacar Diop, imam et chroniqueur, dénonce avec gravité :

« Quand la pauvreté devient un facteur de mortalité, la société tout entière porte la responsabilité morale de chaque vie perdue. Le cancer n’est pas seulement une question médicale, c’est une épreuve collective qui mesure notre humanité. »
Imam chroniqueur Babacar Diop

La féminité blessée et le besoin de soutien

La perte des cheveux, la mastectomie, les transformations du corps et les douleurs psychologiques altèrent profondément l’image de soi. Certaines patientes se voient rejetées par leurs partenaires ou marginalisées par leur entourage. Pourtant, la guérison passe aussi par le regard bienveillant des autres.

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La psychologue Marie Ndiaye, auteure de Vivre le cancer au féminin (Éditions Nouvelles Terres, 2020, p. 87), explique :

« Le soutien affectif, conjugal et spirituel agit comme une thérapie parallèle. Les femmes qui se sentent aimées et valorisées durant le traitement récupèrent mieux, physiquement et émotionnellement. »

À ce propos, Imam chroniqueur Babacar Diop ajoute :

« Une femme qui lutte contre le cancer n’a pas besoin qu’on la plaigne, mais qu’on la tienne debout. L’amour est parfois plus puissant qu’une chimiothérapie. C’est lui qui redonne envie de guérir. »

L’ombre du « khessal » : beauté trompeuse, danger réel

Tandis que certaines se battent pour retrouver la santé, d’autres s’exposent volontairement à des risques cancérigènes à travers la dépigmentation, ou « khessal », phénomène toujours très présent dans les villes sénégalaises.

La dermatologue Dr Fatoumata Ly, présidente de l’Association internationale d’information sur la dépigmentation artificielle (AIIDA), avertit :

« L’usage répété des produits éclaircissants contenant de l’hydroquinone, du mercure ou des corticoïdes expose à des cancers cutanés, des insuffisances rénales et des désordres hormonaux graves » (Conférence AIIDA, Dakar, 2024).

Mais l’industrie cosmétique, les publicités et certaines séries télévisées entretiennent cette illusion du teint clair comme critère de beauté et de réussite.
Pour Imam Babacar Diop, cette tendance traduit une aliénation spirituelle :

« Quand une femme veut changer la couleur que Dieu lui a donnée, ce n’est pas sa peau qu’elle efface, c’est une partie de son identité. Le khessal n’éclaircit pas l’âme, il l’affaiblit. »

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Pour un Octobre permanent

La lutte contre le cancer ne doit pas se limiter au mois d’octobre. Elle doit devenir un engagement de chaque jour, un réflexe de prévention et de solidarité. Comme le disait Cheikh Anta Diop, « le véritable progrès d’une nation se mesure à la santé morale et physique de ses femmes » (Civilisation ou barbarie, Présence Africaine, 1981, p. 210).

Imam chroniqueur Babacar Diop conclut :

« Octobre rose ne doit pas être une parenthèse dans le calendrier, mais une lumière permanente dans nos consciences. Chaque femme sauvée, c’est une famille qui respire, une nation qui se relève, et une humanité qui s’honore. »

En résumé

La beauté véritable ne réside ni dans la blancheur du teint ni dans les artifices de la mode, mais dans la santé, la foi et la dignité. En honorant nos mères, nos sœurs et nos filles qui luttent, nous honorons aussi la vie elle-même.
Que la couleur rose ne soit pas seulement celle d’un ruban, mais celle de l’espérance durable.

imam chroniqueur
Babacar Diop

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