La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), qui regroupe six pays aux potentiels riches et diversifiés, se trouve à la croisée des chemins. Alors que la croissance de la sous-région peine à s’affirmer durablement, un nouveau rapport met en lumière les transformations nécessaires pour relever les défis socio-économiques persistants.

La Banque mondiale, dans son dernier baromètre économique de la CEMAC, dresse un diagnostic clair : si les indicateurs macroéconomiques affichent un certain redressement depuis la crise sanitaire et les chocs successifs liés aux fluctuations des matières premières, la dynamique reste fragile, inégalement répartie et insuffisante pour générer une véritable inclusion sociale.
Au cœur des recommandations : une réorientation ambitieuse de la dépense publique. Une part trop importante des budgets nationaux reste consacrée à des dépenses courantes, au détriment des investissements structurants. Les infrastructures de base routes, énergie, santé, éducation demeurent largement déficientes, freinant le développement du secteur privé et limitant l’intégration régionale.
Le chômage des jeunes, l’exode rural, et la faible diversification économique constituent autant de bombes à retardement sociales. Les économies de la CEMAC, encore trop dépendantes des exportations de pétrole, de gaz et de matières premières, peinent à stimuler des filières de transformation locale capables de créer massivement des emplois décents et durables.
Le rapport insiste également sur l’urgence de renforcer la gouvernance budgétaire. Une meilleure gestion des finances publiques, la lutte contre la corruption et la transparence des investissements publics sont identifiés comme des leviers indispensables pour regagner la confiance des citoyens et des investisseurs. Les déficits chroniques et l’endettement croissant des États de la zone limitent aujourd’hui leur capacité d’action face aux urgences sociales.
Dans cette perspective, le développement du secteur privé est présenté comme la clé de voûte d’une croissance inclusive. Favoriser l’accès au crédit pour les PME, moderniser les dispositifs de formation professionnelle et améliorer l’environnement des affaires sont autant de mesures préconisées pour stimuler l’entrepreneuriat local et l’innovation, en particulier chez les jeunes générations.
Au-delà des enjeux économiques, c’est aussi la stabilité politique de la sous-région qui est en jeu. Les tensions sociales larvées, les défis sécuritaires, et les aspirations démocratiques grandissantes rendent indispensable une approche économique qui combine rigueur macroéconomique, équité sociale et anticipation des risques de crise.
Dans un contexte international de plus en plus concurrentiel et incertain, la CEMAC n’a d’autre choix que d’opérer une transformation stratégique en profondeur. L’alternative est claire : maintenir un statu quo périlleux, ou engager résolument les réformes susceptibles de libérer le potentiel humain et économique de ses 60 millions d’habitants.