Lors de la première édition des BOAD Development Days (BDD) organisée à Lomé, l’ancien Premier ministre béninois et économiste de renom, Lionel Zinsou, a lancé un vibrant appel à une refonte en profondeur des systèmes énergétique et agricole dans l’espace UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine). Devant un parterre de décideurs politiques, d’experts et d’institutions internationales, il a plaidé pour des solutions audacieuses et novatrices pour répondre aux multiples défis structurels qui freinent la croissance de la région.
Dans son discours d’ouverture, Zinsou a dénoncé les « pathologies chroniques » du système financier régional. Selon lui, l’Afrique subsaharienne ne capte actuellement que « moins de 2 % des flux de la finance climat mondiale », un déséquilibre qu’il a qualifié d’inacceptable à l’heure de l’urgence climatique et des besoins pressants en investissement durable. Il a ainsi exhorté les acteurs financiers à adopter des mécanismes de financement plus inclusifs et résilients, capables de mobiliser des ressources à grande échelle.
L’économiste a particulièrement attiré l’attention sur la sous-finance notoire des secteurs de l’agriculture et de l’énergie dans l’espace UEMOA, deux domaines jugés cruciaux pour assurer la sécurité alimentaire et énergétique de la région. Il a cité en exemple le Maroc et l’Afrique du Sud, où les politiques de financement sont, selon lui, « bien plus diversifiées et stratégiques ». Il a également souligné le rôle central que devraient jouer les banques centrales et les ministères des Finances dans la définition de nouvelles priorités d’investissement.
Parmi les pistes de solution évoquées figurait le développement du leasing comme alternative pour surmonter la rareté du capital productif, particulièrement dans les États les moins dotés. Zinsou a aussi mis en lumière l’importance des actifs naturels tels que les mangroves ou les savanes, estimant que ces patrimoines pourraient générer des gains de productivité majeurs s’ils sont correctement valorisés et financés.
L’innovation technologique a également occupé une place centrale dans son intervention. L’ancien chef de gouvernement a recommandé l’extension de l’assurance récolte et le déploiement massif des solutions agritech dans le but d’optimiser les rendements agricoles et de renforcer la résilience des producteurs. Le numérique, selon lui, constitue une « opportunité décisive » pour inverser la tendance actuelle, où l’économie informelle représente près de 50 % du PIB dans plusieurs pays de l’union.
Ces propositions s’inscrivent dans une vision d’ensemble visant à repositionner les économies ouest-africaines dans les chaînes de valeur mondiales, tout en consolidant leur souveraineté énergétique et alimentaire.
Les BOAD Development Days 2025 ont rassemblé près de 200 participants venus de 25 pays, dont 16 experts de haut niveau et 50 institutions internationales. Cette rencontre d’envergure a été l’occasion de débattre des enjeux cruciaux pour le développement de la sous-région, en particulier dans un contexte mondial de plus en plus exigeant en matière de transition écologique et d’innovation inclusive.
La première édition de cet événement a pris fin ce 13 juin, avec l’engagement affirmé des participants à renforcer la coopération régionale et à traduire en actions concrètes les nombreuses recommandations issues des échanges.
Imam chroniqueur Babacar Diop
