
Après plus de dix heures de débats marqués par des tensions et une vive émotion, l’Assemblée nationale a adopté ce mercredi la loi portant interprétation de la loi d’amnistie. Ce texte, longuement attendu par une grande partie des victimes, des détenus et de la majorité parlementaire, a été voté par 126 députés contre 20, sans aucune abstention, sur un total de 146 participants.
Une clarification du champ d’application
La loi vise à préciser le champ d’application de la loi d’amnistie n° 2024-09 du 13 mars 2024, qui avait suscité de nombreuses interrogations et controverses. Selon son article premier, les infractions les plus graves en sont désormais exclues. Ainsi, les auteurs de crimes de sang, meurtres, assassinats, actes de torture ou traitements inhumains et dégradants ne pourront pas bénéficier de l’amnistie.
Cette clarification répond à une demande pressante des organisations de défense des droits humains et de plusieurs associations de victimes, qui dénonçaient une possible impunité pour des crimes graves. « Il était impératif de donner un cadre strict à cette loi afin de garantir que les coupables de violations graves des droits de l’Homme ne puissent échapper à la justice », a déclaré un député de l’opposition lors des débats.
Des débats marqués par l’émotion et la tension
Les échanges à l’Assemblée nationale ont été particulièrement vifs. Certains députés ont évoqué avec émotion les souffrances des victimes et leurs attentes de justice. « Nous devons aux familles endeuillées une réponse claire. L’amnistie ne doit pas être un passe-droit pour les criminels », a martelé un élu de la majorité.
D’autres, en revanche, ont exprimé leurs craintes quant à une possible instrumentalisation politique de cette loi. « Il ne faut pas que cette interprétation serve de prétexte à des règlements de comptes », a averti un parlementaire de l’opposition, appelant à une application rigoureuse et équitable du texte.
Une mise en œuvre sous haute surveillance
Avec cette adoption, la responsabilité revient désormais au ministère de la Justice, qui devra veiller à l’application de la loi et à l’élucidation des infractions exclues de l’amnistie. Le ministre de la Justice a assuré que toutes les garanties seraient prises pour que la justice suive son cours de manière indépendante et transparente.
De son côté, la société civile reste vigilante. Plusieurs organisations ont déjà annoncé leur intention de suivre de près la mise en œuvre de la loi et de saisir, si nécessaire, les juridictions compétentes en cas de manquements. « Nous serons extrêmement attentifs à ce que cette loi soit appliquée dans le respect des droits des victimes et des principes de justice », a déclaré un représentant d’une ONG locale.
Un tournant dans le processus de réconciliation nationale ?
Cette adoption marque une nouvelle étape dans le processus de réconciliation nationale engagé par les autorités. Si certains voient en cette loi une avancée vers la justice et la vérité, d’autres estiment qu’elle ne répond pas pleinement aux attentes de toutes les parties concernées.
Dans les prochains jours, les réactions des familles des victimes, des détenus concernés et des organisations internationales permettront de mesurer l’impact réel de cette décision législative sur le climat politique et social du pays. En attendant, la balle est dans le camp du gouvernement, qui devra prouver sa volonté de concilier justice et réconciliation dans un contexte encore marqué par les blessures du passé.
Iman chroniqueur Babacar DIOP