Ziguinchor face à la recrudescence des grossesses scolaires : un cri d’alarme pour l’avenir des filles

Le phénomène des grossesses précoces en milieu scolaire prend des proportions inquiétantes à Ziguinchor. Lors d’un comité de pilotage organisé par l’ONG Usoforal, en partenariat avec les autorités éducatives locales, il a été révélé que plus de 157 cas ont été enregistrés l’année dernière — un chiffre déjà dépassé pour 2025.
Selon Siga Diouf Fall, responsable du genre à l’Inspection d’académie de Ziguinchor, « cette année, nous avons franchi la barre de 157 cas de grossesse en milieu scolaire », soulignant ainsi la gravité d’un phénomène qui menace directement la scolarisation des jeunes filles. Elle rappelle que « la grossesse n’a qu’une seule cause : les rapports sexuels non protégés. Tout le reste n’est que facteur aggravant ».
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Entre silence social et responsabilité partagée
Les causes de cette situation sont multiples : manque d’éducation sexuelle adaptée, pauvreté, absence de communication entre parents et enfants, mais aussi abus de pouvoir de certains adultes. Pour Sanoussy Camara, chargé de projet à Usoforal, la lutte est freinée par « la faible mobilisation de certains acteurs, notamment les conseillers municipaux, et la difficulté à organiser des formations dans les établissements scolaires ».
Les responsables éducatifs appellent à une mobilisation collective : parents, enseignants, élus locaux et leaders communautaires doivent agir ensemble pour protéger les jeunes filles. Comme le souligne la pédagogue Dr Fatoumata Sarr, spécialiste des questions de genre (Université Assane Seck de Ziguinchor), « chaque grossesse scolaire est une promesse d’avenir brisée. Derrière les chiffres, il y a des destins fauchés et des rêves suspendus » (in « Éducation, genre et développement au Sénégal », L’Harmattan, 2020, p. 83).
Un enjeu de santé publique et de justice sociale
Au-delà du cadre scolaire, la question des grossesses précoces renvoie à des défis sanitaires et sociaux profonds. Selon un rapport de l’UNFPA (2024), le Sénégal enregistre chaque année plus de 7 000 cas de grossesses précoces, avec des conséquences dramatiques sur la santé maternelle et la poursuite des études.
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L’islam, dans sa sagesse éducative, insiste sur la protection morale et physique des jeunes. Le Prophète ﷺ a dit :
« Ô jeunes gens ! Que celui d’entre vous qui a la capacité se marie, car cela est plus à même de baisser le regard et de préserver la chasteté »
(Hadith rapporté par al-Bukhârî, n°5066).
De son côté, le penseur musulman Ibn al-Qayyim rappelle que « la corruption des mœurs commence lorsque les éducateurs cessent de guider la jeunesse » (Tuhfat al-Mawdûd bi Ahkâm al-Mawlûd, p. 34).
Des pistes pour inverser la tendance
Pour freiner cette spirale, des initiatives communautaires se multiplient à Ziguinchor. Usoforal promeut des formations sur le leadership féminin dans les communes de Djignaky, Boutoupa-Camaracounda et Oulampane, avec l’objectif d’encourager les femmes à occuper des postes décisionnels. Mais pour Mme Fall, cela ne suffira pas sans un changement de mentalité global :
« Il faut parler aux jeunes filles, mais aussi aux garçons, leur enseigner le respect du corps et la responsabilité. »
Le sociologue Cheikh Guèye (IFAN, UCAD) abonde dans le même sens : « L’école doit redevenir un lieu de protection et non d’exposition. Les enseignants, les pairs et les familles doivent redevenir des repères moraux » (in « Les mutations sociales et la jeunesse sénégalaise », PUF, 2019, p. 112).
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Conclusion : une urgence éducative et morale
Ziguinchor, souvent saluée pour son dynamisme éducatif, est aujourd’hui confrontée à un défi majeur : sauver ses filles de la déperdition scolaire liée aux grossesses précoces.
Comme l’a dit Serigne Abdou Aziz Sy Al Amine :
« Protéger la fille, c’est préserver la société, car c’est elle qui porte la vie et l’avenir. »
Ce combat dépasse les statistiques. Il s’agit désormais d’un impératif moral, éducatif et communautaire pour garantir à chaque fille la possibilité d’un avenir digne et épanoui.
Imam chroniqueur
Babacar Diop













