Le Geste de l’Enseignant : Un Langage Silencieux au Service de la Pédagogie

Dans le vaste champ de l’enseignement, le geste constitue bien plus qu’un simple accompagnement de la parole : il est un outil pédagogique majeur, un véritable langage parallèle qui renforce la compréhension, la mémorisation et la relation entre le maître et ses élèves.
Le corps, premier instrument d’enseignement
Le geste de l’enseignant traduit son intention, structure son discours et attire l’attention des apprenants. Lever la main pour demander le silence, pointer un mot au tableau, mimer une action : chacun de ces gestes guide l’élève vers le sens.
Comme le souligne le pédagogue Philippe Meirieu dans Apprendre… oui, mais comment ? (ESF Éditeur, 1991, p. 112) :
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« Le corps de l’enseignant parle avant même que sa voix ne s’élève. Il rend visible la pensée et permet à l’élève de s’y accrocher. »
Cette corporéité pédagogique devient un pont entre le mot et le sens, surtout lorsque la langue d’enseignement n’est pas la langue maternelle des enfants. Plutôt que de recourir à la traduction, l’enseignant peut illustrer le mot par le geste : écris, ouvre, regarde, écoute, montre.
Ainsi, l’enfant comprend par le corps avant de comprendre par le langage.
Une pédagogie du sens et de la mémoire
Le geste soutient non seulement la compréhension immédiate, mais aussi la mémorisation durable. Selon les travaux de François Reuter (Le corps et la parole en pédagogie, De Boeck, 2007, p. 68) :
« L’association du mouvement et de la parole crée une trace mnésique plus profonde, car le cerveau encode simultanément le visuel, le moteur et le linguistique. »
Autrement dit, le geste engage plusieurs canaux sensoriels, ce qui facilite la rétention du savoir. Dans l’apprentissage d’une langue étrangère, ce phénomène est particulièrement puissant : l’enfant associe le mot à une image motrice, et non à une traduction abstraite.
Le geste, expression de bienveillance et d’autorité
Le geste de l’enseignant est également relationnel. Il peut apaiser, encourager, féliciter ou recentrer. Le ton du corps, la posture, le regard participent à instaurer un climat de confiance et de respect mutuel.
Comme l’affirme la chercheuse Marie-Claude Monchaux dans Les gestes du maître (Éditions Retz, 2015, p. 42) :
« La gestuelle du pédagogue est un acte d’amour silencieux. Elle dit à l’élève : “Je te vois, je t’écoute, je t’accompagne.” »
La parole du chroniqueur : le geste, une métaphore spirituelle
Selon Imam Babacar Diop :
« Le geste de l’enseignant, c’est une lumière qui accompagne la parole. Il transforme le savoir en expérience vécue. Enseigner sans geste, c’est comme prier sans intention : le mouvement perd son âme. »
Dans une perspective spirituelle, le geste de l’enseignant peut être comparé à l’acte prophétique de transmission. Le Prophète Muhammad (paix et salut sur lui) joignait souvent le geste à la parole pour enseigner : il traçait des lignes dans le sable, pointait le ciel pour expliquer l’unicité divine, ou montrait trois doigts pour enseigner la modération.
Ce lien entre corps et sens révèle la profondeur pédagogique de la tradition islamique elle-même.
Vers une pédagogie incarnée
Dans les classes contemporaines, marquées par la diversité linguistique et culturelle, le geste redevient un outil inclusif. Il traverse les barrières de la langue, rend l’enseignement plus vivant et humanise la relation éducative.
Ainsi, comme le résume Imam Babacar Diop :
« Le bon enseignant n’instruit pas seulement avec sa voix, mais avec tout son être. Son regard enseigne la bienveillance, sa main enseigne le respect, son geste enseigne la vérité. »
Imam chroniqueur
Babacar Diop













