Lutte antitabac au Sénégal : une mobilisation freinée par l’inaction réglementaire

Partager cet article

PAR IMAM CHRONIQUEUR BOUBACAR DIOP

Lutte antitabac au Sénégal : une mobilisation freinée par l’inaction réglementaire

À l’occasion de la Journée mondiale sans tabac, célébrée le 31 mai, la Ligue Sénégalaise Contre le Tabac (LISTAB) a tiré la sonnette d’alarme sur l’état préoccupant de la lutte antitabac au Sénégal. Dans un communiqué au ton ferme, l’organisation pointe du doigt l’inertie des autorités sanitaires et l’impasse réglementaire qui paralyse l’application effective de la loi votée en 2014.

Plus de dix ans après l’adoption de la loi antitabac le 14 mars 2014, plusieurs textes d’application demeurent bloqués, rendant la législation largement inopérante. Selon LISTAB, « certains décrets indispensables à la mise en œuvre de cette loi dorment dans les tiroirs depuis plus de cinq ans », malgré les changements au sein du ministère de la Santé et de l’Action Sociale.

L’organisation déplore une continuité dans l’inaction : « L’administration actuelle, à l’image de celles qui l’ont précédée, n’a posé aucun acte concret permettant de faire progresser la lutte contre le tabac. »Le phénomène des bars à chicha illustre cette dérive.

Plus de 600 établissements de ce type seraient aujourd’hui recensés à Dakar, offrant aux jeunes un accès facilité au tabagisme. LISTAB alerte sur l’ampleur du phénomène, qui touche particulièrement les adolescents âgés de 10 à 18 ans.

« La chicha devient une passerelle vers d’autres formes de consommation comme le vapotage, sous le regard passif des autorités », souligne le communiqué.Face à cette situation, le président de la Ligue, Amadou Moustapha Gaye, appelle à une refonte du dialogue entre les pouvoirs publics et les acteurs de terrain.

Il exhorte le ministre de la Santé, Ibrahim Sy, à « rencontrer les représentants légitimes et expérimentés du secteur », plutôt que de s’en remettre à une administration jugée déconnectée des réalités.LISTAB va plus loin en demandant le retrait de certains projets de loi en préparation, qu’elle accuse d’être « élaborés en catimini » sans concertation.

L’association dénonce également « des comportements affairistes au sein même de la société civile », qui nuiraient gravement à la crédibilité et à l’efficacité du combat antitabac.Sur le plan international, la situation du Sénégal s’avère tout aussi préoccupante.

Le pays serait aujourd’hui en infraction vis-à-vis de plusieurs engagements pris dans le cadre de la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte antitabac, ainsi que des directives de la CEDEAO et de l’UEMOA. La prolifération de produits du tabac illicites et l’absence de mesures fiscales appropriées mettent à mal ces engagements et fragilisent la santé publique.

La Ligue Sénégalaise Contre le Tabac appelle donc à un sursaut des autorités pour sortir de l’impasse actuelle. Au-delà des textes, c’est une volonté politique forte et une action coordonnée qui sont désormais indispensables pour freiner l’expansion du tabagisme et protéger les générations futures.

Imam chroniqueur Babacar Diop

Partager cet article

Recherche en direct

Catégories

Autres publications

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Activer les notifications Accepter Non, merci