Nigeria / Festac : Démolitions à Lagos, entre loi, désarroi et leçons politiques

Par Aïcha Ajayi | Dunia News
Un vent de désolation souffle sur Lagos, à Festac, depuis les premières heures de la matinée du samedi 11 octobre 2025.
À quelques mètres de Canal Bridge, sur la route d’Icherie, les bulldozers ont grondé sans relâche, réduisant en poussière plusieurs maisons et boutiques jugées illégales.
Des cris, des pleurs, des visages couverts de poussière et d’incompréhension : c’est le décor d’une journée où la légalité a rencontré la détresse humaine.
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« Je vends ici depuis dix ans, raconte Mama Esther, la voix tremblante. Personne ne nous a prévenus. Ce matin, j’ai juste entendu le bruit des machines, et tout était fini. Mon commerce, mes économies, tout est parti. »
Plus loin, Johnson, jeune propriétaire d’un kiosque, contemple les décombres de ce qui fut son gagne-pain.
« Oui, on savait qu’on devait régulariser, mais les démarches sont compliquées et longues. On attendait une nouvelle campagne de régularisation. Aujourd’hui, c’est trop tard. »
Les autorités locales, de leur côté, justifient cette opération comme une mesure d’assainissement urbain.
Un responsable du département d’urbanisme affirme que « la plupart des constructions détruites n’étaient pas enregistrées, et certaines occupaient illégalement des zones inondables ou réservées à l’État ».
Mais au-delà des justifications administratives, cette scène de Festac révèle une fracture politique et sociale : celle entre un État qui impose sans expliquer et une population qui subit sans comprendre.

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Analyse politique : quand la loi oublie le cœur du peuple
Les opérations de démolition, bien que prévues par la loi, soulèvent une question fondamentale : pour qui l’État agit-il ?
Lorsqu’un gouvernement décide de casser sans accompagner, de punir sans prévenir, il ne renforce pas la loi — il creuse la méfiance.
La politique urbaine dans plusieurs villes du Nigeria — Festac, Lagos Mainland, Ikeja ou Ibadan — souffre du même mal : un déséquilibre entre l’autorité et la proximité.
On parle de planification, mais rarement de pédagogie. On parle de réglementation, mais jamais d’humanité.
Cette situation traduit un problème de gouvernance participative.
L’État construit des règles, mais les citoyens n’en sont pas acteurs.
Or, la démocratie ne se mesure pas seulement dans les urnes, mais dans la manière dont les décisions façonnent le quotidien.
Il ne suffit pas de brandir le mot « ordre ».
Il faut le précéder de justice, de dialogue et de compassion.
Conseil à la population : prévenir plutôt que subir
Aux habitants de Festac et d’ailleurs, cet événement doit servir d’alerte.
Avant de bâtir, demandez le permis.
Avant de louer, vérifiez la légalité du terrain.
Avant d’investir, renseignez-vous auprès des services municipaux.
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Car dans un pays où les institutions manquent parfois de clarté, la prudence devient une forme d’intelligence citoyenne.
Mais à l’État aussi de se réinventer.
De ne plus apparaître comme un bourreau venu casser, mais comme un bâtisseur venu accompagner.
Car la vraie force d’un pouvoir, c’est sa capacité à protéger sans écraser.
À Lagos, le silence des rues après le passage des bulldozers en dit long :
ce n’est pas seulement du béton qu’on a brisé, mais une confiance fragile entre un peuple et ses dirigeants.
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