Repenser la politique du livre : un forum pour réenchanter la lecture au Sénégal

Par Imam chroniqueur Babacar Diop
Les 16 et 17 octobre prochains, le Sénégal vivra au rythme du premier Forum national sur le livre et la lecture, une initiative inédite placée sous l’égide du ministre de la Culture, de l’Artisanat et du Tourisme, Amadou Ba. Ce rendez-vous ambitionne de rassembler éditeurs, écrivains, libraires, enseignants, lecteurs et décideurs autour d’une question cruciale : comment redonner au livre sa place centrale dans l’éveil intellectuel et moral des populations, en particulier de la jeunesse sénégalaise ?
Amadou Ba, face à la presse, a insisté sur l’urgence de “repenser la politique du livre afin de reconnecter la société à la lecture, cet acte qui fonde la conscience et nourrit la citoyenneté”. Pour lui, le livre n’est pas un simple objet de consommation culturelle, mais un outil de transformation sociale et de souveraineté intellectuelle.
À lire aussi : 🇨🇮 Côte d’Ivoire : Le Front Commun PPA-CI – PDCI-RDA appelle à poursuivre la marche pour la démocratie et la justice
Le livre, pilier de la conscience nationale
Dans un contexte marqué par la domination du numérique et le recul de la lecture approfondie, le forum se veut un espace de diagnostic et de refondation. Il s’agira d’examiner toute la chaîne du livre : la création, la production, la distribution, la diffusion, mais aussi la formation des acteurs du secteur.
Le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne, dans son ouvrage Le Fanal de la raison (Albin Michel, 2023, p. 47), rappelle avec justesse :
“La lecture, au-delà du plaisir, est un exercice de liberté ; elle apprend à l’esprit à respirer hors des cadres imposés.”
Cet esprit de liberté, le forum veut le raviver dans une société où l’oralité demeure puissante, mais où le livre peine à retrouver son pouvoir fédérateur.
La lecture comme acte spirituel et civique
Dans la tradition islamique, la première révélation adressée au Prophète Muhammad (PSL) fut un appel à la lecture : “Iqra’ !” — Lis ! (Sourate Al-‘Alaq, 96:1). Ce verset rappelle que toute renaissance intellectuelle commence par la lecture. Comme l’écrivait Ibn Khaldoun dans sa Muqaddima (p. 112, éd. Bayrouth, 2006) :
“Une civilisation décline lorsque le livre perd son autorité sur les consciences.”
Cet avertissement résonne fortement aujourd’hui, alors que la jeunesse semble se détourner du livre au profit des écrans.
Pour une politique du livre plus inclusive
À lire aussi : 🇧🇯 Présidentielle 2026 : Maître Renaud Vignilé Agbodjo, l’avocat qui veut défier le système
Ce forum sera aussi l’occasion de repenser les infrastructures de lecture, notamment les bibliothèques scolaires, les médiathèques régionales et les politiques d’édition en langues nationales. Car, comme le souligne Cheikh Hamidou Kane dans L’Aventure ambiguë (Julliard, 1961, p. 93) :
“Nous avons appris à lire dans le livre des autres, et nous avons oublié d’écrire le nôtre.”
La reconquête du livre doit donc être une reconquête de soi.
Parole d’imam chroniqueur : le livre, miroir de l’âme
Permettez-moi ici une réflexion personnelle. Le livre, lorsqu’il est bien lu, devient un miroir dans lequel l’homme se découvre et s’élève. Comme je l’écrivais récemment dans une chronique sur l’éducation spirituelle :
“Lire, c’est converser avec Dieu à travers les mots des hommes. C’est apprendre à écouter le silence des pages, là où la sagesse chuchote.”
Ce forum sur le livre et la lecture doit être plus qu’un simple événement ministériel ; il doit devenir un mouvement national pour la réhabilitation de l’esprit. Car une nation qui lit est une nation qui pense, et une nation qui pense est une nation qui se libère.
À lire aussi : Nigeria / Festac : Démolitions à Lagos, entre loi, désarroi et leçons politiques
Références :
Souleymane Bachir Diagne, Le Fanal de la raison, Albin Michel, 2023, p. 47.
Ibn Khaldoun, Al-Muqaddima, éd. Bayrouth, 2006, p. 112.
Cheikh Hamidou Kane, L’Aventure ambiguë, Julliard, 1961, p. 93.
Coran, Sourate Al-‘Alaq (96:1).
Babacar Diop, Chroniques de l’âme et de la cité, inédit.
Imam chroniqueur
Babacar Diop













