Rwanda : Kigali appelle le Conseil de sécurité de l’ONU à ne pas “compliquer” l’application de l’accord de Washington

DUNIA News | Kigali, 14 octobre 2025
Le gouvernement rwandais a appelé ce mardi 14 octobre 2025 le Conseil de sécurité des Nations Unies à faire preuve de “responsabilité et de discernement” dans le suivi de l’accord de Washington, signé en septembre entre le Rwanda, la République démocratique du Congo (RDC) et les États-Unis. Cet accord, destiné à apaiser les tensions frontalières dans la région des Grands Lacs, fait déjà l’objet de débats au sein des instances onusiennes.
Selon Kigali, toute tentative d’ingérence ou de modification unilatérale du cadre fixé à Washington risquerait de compromettre les efforts de stabilisation régionale et de raviver des tensions militaires latentes.
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Une mise en garde diplomatique de Kigali
Le ministre rwandais des Affaires étrangères, Vincent Biruta, a pris la parole lors d’une conférence de presse tenue au siège du ministère à Kigali. Il a rappelé que le Rwanda demeure “pleinement engagé” à respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord, mais a dénoncé certaines pressions extérieures jugées “contre-productives”.
“Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle diplomatie d’ingérence. Le Rwanda reste un acteur de paix, mais la paix ne doit pas être instrumentalisée par des puissances qui cherchent à imposer leur lecture de la situation”, a déclaré M. Biruta.
Le diplomate a notamment cité des propositions récentes de certains membres du Conseil de sécurité appelant à étendre le mandat des forces onusiennes en RDC (MONUSCO) pour surveiller les frontières communes. Une initiative que Kigali considère comme une “provocation déguisée”, susceptible de créer des malentendus militaires.
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Le contexte de l’accord de Washington
Signé le 22 septembre 2025 sous médiation américaine, l’accord de Washington marque un tournant majeur dans la diplomatie régionale. Il prévoit :
• Le retrait progressif des troupes rwandaises et congolaises des zones frontalières sensibles ;
• La création d’une commission mixte de suivi pilotée par les États-Unis ;
• Et le désarmement coordonné de plusieurs groupes armés actifs dans l’est de la RDC.
Washington a présenté cet accord comme “un pas décisif vers une paix durable” entre Kigali et Kinshasa, deux capitales souvent opposées sur la question du M23 et de la sécurité frontalière.
Cependant, certaines chancelleries européennes ont exprimé des réserves sur la transparence des mécanismes de mise en œuvre, craignant que le Rwanda puisse garder une influence militaire indirecte dans certaines zones de l’est congolais.
Kigali dénonce les “pressions sélectives”
Face à ces critiques, le Rwanda maintient qu’il agit “dans le respect total du droit international et des engagements bilatéraux pris”.
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“Ce qui menace la paix, ce ne sont pas les actions du Rwanda, mais les interprétations biaisées qui prolongent la méfiance”, a insisté M. Biruta.
Le ministre a aussi rappelé que le Rwanda a accueilli depuis janvier 2025 plus de 35 000 réfugiés congolais, et que son armée a contribué à la stabilisation de certaines zones frontalières “abandonnées par la communauté internationale”.
Un haut responsable du ministère, cité par DUNIA News, a ajouté que le Conseil de sécurité ne doit pas transformer l’accord en instrument de surveillance punitive :
“Les Rwandais veulent la paix, pas un retour aux accusations mutuelles. L’accord de Washington doit être appliqué dans l’esprit de coopération, pas de contrôle.”
Réactions et positions internationales
À New York, la porte-parole adjointe du Secrétaire général de l’ONU a confirmé que le dossier ferait partie des discussions à huis clos de la semaine. Elle a toutefois précisé que “l’ONU reste neutre” et qu’elle “soutient tous les efforts diplomatiques contribuant à la stabilité dans la région des Grands Lacs”.
Les États-Unis, par la voix du Département d’État, ont réaffirmé leur confiance dans les deux gouvernements signataires et ont invité “toutes les parties à s’en tenir à la lettre et à l’esprit de l’accord”.
De son côté, la RDC a salué “une position ferme” du Rwanda, tout en appelant à “un dialogue franc et direct” sous médiation internationale pour éviter tout malentendu.
DUNIA News – Analyse
Cette sortie diplomatique de Kigali s’inscrit dans une stratégie claire : préserver sa souveraineté diplomatique tout en consolidant son image d’État stable et prévisible. Le Rwanda redoute que certaines puissances, notamment européennes, cherchent à réinterpréter l’accord de Washington au profit d’agendas politiques régionaux.
Pour les observateurs interrogés par DUNIA News Afrique de l’Est, cette déclaration de Vincent Biruta est aussi un message adressé à Washington :
“Kigali veut montrer qu’il n’est pas un simple exécutant des décisions américaines, mais un partenaire stratégique capable de défendre sa vision régionale.”
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Au-delà du jeu diplomatique, cette mise au point rappelle la fragilité de la paix dans la région des Grands Lacs, où chaque mot peut rallumer une étincelle dans un terrain encore inflammable.
Rédaction DUNIA News Rwanda — Kigali
Par Frédéric Herman Tossoukpe
Rédacteur en chef – DUNIA News International

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