
Par Imam chroniqueur Babacar Diop
La Tamxarit, célébrée le 10e jour du mois de Muharram, est une fête religieuse et culturelle profondément ancrée dans les sociétés ouest-africaines, en particulier au Sénégal. Elle est marquée par le partage du célèbre thiéré, couscous à base de mil, souvent accompagné de sauce tomate, de viande, et d’une panoplie d’ingrédients que la créativité culinaire populaire ne cesse d’enrichir. Mais à force de vouloir faire plaisir aux papilles, on en oublie parfois la sagesse de l’assiette.
C’est ce que rappelle Dr Fatoumata Niang, docteure en physiologie et spécialiste en métabolisme énergétique. Elle met en garde : « Les mélanges notés dans le thiéré Tamxarit moderne rendent le plat indigeste et hypercalorique. Fromages industriels, merguez, hot-dogs, beurre… Tous ces ajouts perturbent le métabolisme et exposent à des troubles digestifs et à l’hyperglycémie. »
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Le mil, un aliment ancestral aux vertus reconnues
Traditionnellement, le thiéré est préparé à base de mil, une céréale aux propriétés intéressantes : faible indice glycémique, richesse en fibres et en protéines végétales, apport modéré en calories. Comme le rappelle Dr Walter Willett, professeur en nutrition à la Harvard T.H. Chan School of Public Health :
« Les céréales complètes comme le mil sont bénéfiques dans la prévention du diabète de type 2 et des maladies cardiovasculaires. »
(Source : “Eat, Drink, and Be Healthy”, Dr Walter Willett, Harvard University Press, 2005, p. 67)
Cependant, selon Dr Niang, les bienfaits du mil sont neutralisés quand on y ajoute des ingrédients gras ou ultra-transformés. « C’est la composition globale du plat qui compte. Le mil seul est un bon choix, mais combiné à de la charcuterie et à des sauces trop grasses, il devient un risque pour la santé », précise-t-elle.
Le piège des sauces enrichies et de la “tendance calorique”
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Dans de nombreuses familles, la sauce du thiéré Tamxarit s’est complexifiée. À côté de la traditionnelle viande mijotée, on trouve désormais merguez, cubes bouillons, concentrés salés, beurres et même crème. Pour Dr Jean-Michel Lecerf, chef du service nutrition à l’Institut Pasteur de Lille :
« Trop d’huile, de sel et de produits transformés dans une même préparation créent une charge glycémique importante et favorisent les déséquilibres métaboliques. »
(Source : “Le goût et la santé”, Éditions Odile Jacob, 2013, p. 112)
Le docteur Niang recommande plutôt de réduire la quantité d’huiles végétales, d’éviter les bouillons chimiques, et de privilégier les légumes naturels et la viande maigre. Elle propose aussi d’intégrer légumineuses et raisins secs au couscous, pour un équilibre entre fibres, protéines et sucres naturels.
Une célébration entre tradition et santé
Le thiéré Tamxarit est plus qu’un plat. Il est un marqueur identitaire, un vecteur de solidarité et une occasion de partage. Pourtant, la démesure culinaire de certaines recettes peut transformer cette célébration en cauchemar digestif. Comme l’écrit Dr David Ludwig, endocrinologue à Harvard :
« Plus un repas est calorique et transformé, plus il devient inflammatoire et perturbe les signaux de satiété. »
(Source : “Always Hungry?”, Grand Central Life & Style, 2016, p. 88)
Conclusion : revenir à l’essentiel, pour préserver le sens et la santé
Il est temps de réconcilier tradition et équilibre alimentaire. La Tamxarit ne doit pas être un prétexte pour céder à la surenchère culinaire. Bien au contraire, elle peut devenir une opportunité de valoriser les produits locaux dans leur forme la plus saine.
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À l’instar du philosophe gastronome Brillat-Savarin qui disait :
« Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es »,
il serait temps de méditer cette parole à l’ombre d’un bon plat de thiéré… sans excès.
Imam chroniqueur Babacar Diop