Une affaire de plus en plus inquiétante secoue les réseaux sociaux sénégalais, notamment TikTok, où des témoignages glaçants émergent autour des injections esthétiques pratiquées sans autorisation médicale. Au cœur de cette polémique : une influenceuse connue sous le pseudonyme de Been2, accusée d’avoir administré à de nombreuses jeunes femmes des substances destinées à augmenter le volume des seins, des fesses et des hanches.

L’affaire a pris une tournure dramatique lorsque M.D. Thiam, l’une des victimes présumées, a partagé son témoignage dans les colonnes du journal Libération. Elle y raconte avec émotion et détresse les conséquences de cette injection :
« J’avais payé 105 000 F CFA pour augmenter ma poitrine. Au début, tout semblait normal. Mais quelques semaines plus tard, mes seins ont commencé à me faire terriblement mal. Aujourd’hui, ils sont infectés, comme s’ils pourrissaient », confie-t-elle, visiblement traumatisée.
Ce témoignage n’est pas isolé. Plusieurs autres jeunes femmes affirment avoir subi des complications similaires après avoir eu recours aux services de Been2, attirées par les vidéos séduisantes diffusées en ligne. Ces interventions, pratiquées sans encadrement médical, exposent les victimes à de graves risques sanitaires.
Le phénomène des injections clandestines, souvent réalisées avec des produits d’origine douteuse, n’est pas nouveau. Mais il prend une ampleur inquiétante avec l’effet de la viralité sur les réseaux sociaux, où des influenceuses transforment leur corps en argument commercial.
Le professeur Mamadou Mbow, chirurgien plasticien à Dakar, alerte depuis plusieurs années sur ces dérives :
« Injecter un produit sans connaître sa composition, sans hygiène ni suivi médical, c’est jouer avec la vie des gens. Ces femmes risquent des infections graves, des nécroses, voire des amputations » (in : Esthétique et éthique médicale au Sénégal, Éditions Harmattan, 2021, p. 89).
Face à l’ampleur du scandale, des voix s’élèvent pour demander une répression plus sévère de ces pratiques. Le ministère de la Santé a promis l’ouverture d’une enquête et une coopération renforcée avec les services de cybercriminalité.
Mais au-delà de la répression, c’est une prise de conscience collective qui s’impose. Selon la psychologue sociale Rokhaya Diallo, auteure de Les corps sous influence (Présence Africaine, 2022),
« la pression sociale exercée sur les femmes pour correspondre à un idéal physique irréaliste alimente ce marché clandestin. Il faut déconstruire ces normes et redonner à chaque femme le droit de disposer de son corps sans danger ni illusion. »
Au Sénégal, l’exercice illégal de la médecine est puni par le Code pénal (article 240) et peut entraîner des peines allant jusqu’à 5 ans de prison ferme. Si la mise en danger d’autrui est avérée, les poursuites peuvent inclure des chefs d’accusation plus graves, comme l’administration de substances nuisibles ou la mise en danger de la vie d’autrui.
imam chroniqueur Babacar Diop