Quand la Poésie Écoute le Monde : Lecture de Polyphonies du Cœur d’Ibrahima Niagui

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Quand la Poésie Écoute le Monde : Lecture de Polyphonies du Cœur d’Ibrahima Niagui

Dans Polyphonies du Cœur, Ibrahima Niagui, connu sous le nom de plume « l’Académicien », nous livre un recueil vibrant, profondément ancré dans les battements multiples de la vie intérieure et collective. Son œuvre, à la croisée de la poésie lyrique et du témoignage humaniste, se présente comme un tissage de voix, de sensations et de convictions où chaque poème devient l’écho d’un monde vécu, rêvé ou dénoncé.

Dès les premières pages, le lecteur est happé par une parole plurielle : les accents dévots du mois de Ramadan côtoient les élans tendres d’un hommage aux parents, les bruissements de l’amour s’entrelacent aux cris étouffés face aux injustices. Cette diversité thématique, loin de fragmenter l’ouvrage, participe à sa cohérence profonde : celle d’un cœur qui bat au rythme du monde.

Comme l’écrit la poéticienne contemporaine Catherine Millet :

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« Le poète est celui qui rend audible ce qui reste inaudible dans le tumulte du monde » (La Vie silencieuse des émotions, Seuil, 2019, p. 72).
Et c’est précisément ce que réussit Niagui : il transforme le murmure intime en parole universelle.

Une écriture libre mais structurée

Si la forme est volontairement souple, parfois affranchie des carcans classiques de la versification, elle n’en est pas moins maîtrisée. L’écriture suit une logique intérieure propre au souffle poétique. Cette liberté formelle rejoint la pensée du poète et critique américain Robert Pinsky qui soutenait que :

« La poésie n’est pas soumise à une forme, elle crée la sienne à partir de la nécessité de dire ce qui ne peut se dire autrement » (The Sounds of Poetry, Farrar, 1998, p. 41).

Niagui ne cherche donc pas la performance esthétique, mais l’authenticité expressive. Il préfère l’intensité de l’émotion à la rigueur de la métrique, la sincérité du verbe au clinquant des effets de style.

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L’intime et le collectif, la nature et le divin

Ce recueil se distingue aussi par sa capacité à croiser l’individuel et l’universel. Dans certains textes, c’est la voix d’un fils, d’un croyant, d’un amoureux, qui prend la parole. Dans d’autres, c’est celle d’un citoyen, d’un témoin du monde, d’un défenseur de la justice. Cette perméabilité entre le personnel et le politique fait écho à la définition du poète selon Aimé Césaire :

« Le poète est celui qui assume l’histoire dans la chair de son langage » (Discours sur le colonialisme, Présence Africaine, 1955, p. 19).

Ibrahima Niagui fait également appel à une nature symbolique, miroir des états de l’âme, mais aussi révélatrice des dérèglements du monde. Les arbres, le vent, la mer sont convoqués non pour faire décor, mais pour participer au questionnement de l’existence humaine.

Dans une époque marquée par le désenchantement et l’accélération, ce retour à une parole poétique enracinée dans le réel et le sacré résonne comme une nécessité. Le philosophe François Jullien rappelait :

« L’art, et la poésie en particulier, est une ressource pour penser autrement, dans les intervalles, dans le retrait du discours dominant » (Il n’y a pas d’identité culturelle, L’Herne, 2016, p. 64).

Une œuvre-miroir du lecteur

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Polyphonies du Cœur n’impose pas une vérité ; il propose un miroir. À travers lui, chaque lecteur peut voir se refléter une part de ses propres émotions, de ses colères, de ses espoirs. Ce faisant, l’auteur nous invite à une introspection profonde et bienveillante. C’est une poésie qui ne cherche pas à briller, mais à toucher, et cela la rend précieuse.

Comme le souligne la professeure de littérature contemporaine Dominique Rabaté :

« La poésie moderne ne donne pas des leçons : elle ouvre des espaces où chacun peut venir habiter » (Poétiques de la voix, Corti, 2013, p. 53).

Par imam chroniqueur Babacar Diop

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