TOGO – Le rappeur Aamron présente ses excuses publiques à Faure Gnassingbé depuis un centre psychiatrique : repentance sincère ou mise en scène politique ?

Partager cet article

Zébé, 5 juin 2025 – Dans une vidéo publiée sur TikTok depuis le centre psychiatrique de Zébé, le rappeur togolais Aamron, de son vrai nom Tchala Essowe Narcisse, a bouleversé l’opinion en présentant ses excuses publiques au président Faure Essozimna Gnassingbé. Ce revirement inattendu interroge : acte sincère de lucidité ou discours téléguidé depuis l’ombre ?

Une vidéo sobre, une posture nouvelle

Le rappeur, longtemps considéré comme l’un des artistes les plus critiques du régime togolais, a surpris par la sérénité de son ton et la mesure de ses propos.

« Togolaises et Togolais, je vous espère en pleine forme dans le meilleur des mondes », déclare-t-il dès les premières secondes de la vidéo.

À lire aussi : La Cité Interdite de Pékin : un joyau impérial au cœur de l’histoire chinoise

Loin des punchlines abrasives qui ont fait sa réputation, Aamron adopte ici un ton calme, presque spirituel, rompant radicalement avec ses anciennes sorties enflammées.

Reconnaissance de ses torts : « J’ai franchi les limites »

Dans cette intervention, l’artiste reconnaît avoir tenu des propos « discourtois et outrageux » à l’encontre du président togolais. Il se dit conscient des implications juridiques de ses paroles :

« Nous vivons dans un État de droit. Quiconque viole la loi doit s’attendre à en subir les conséquences », affirme-t-il.

Un discours en totale opposition avec ses revendications passées, où il dénonçait un régime autoritaire et exigeait justice pour la jeunesse togolaise.

Un diagnostic psychiatrique comme tournant décisif

À lire aussi : Gaza : Quatre journalistes palestiniens tués dans une frappe israélienne visant un hôpital

Selon ses déclarations, tout aurait changé lors de son interpellation par les forces de l’ordre, au cours de laquelle il aurait été examiné par une équipe médicale.
Le diagnostic : dépression sévère aggravée.

Interné depuis, Aamron dit avoir retrouvé une forme d’équilibre :

« Après quelques jours de traitement, je suis un peu plus apaisé et je prends conscience de la gravité de mes propos. »

Il attribue ses accès de colère, ses dénonciations publiques et ses vidéos polémiques à ce trouble psychique, désormais pris en charge.

Des excuses solennelles à Faure Gnassingbé

Le moment le plus marquant de la vidéo reste cette déclaration :

« Je présente mes sincères excuses à son excellence Faure Essozimna Gnassingbé, alors qu’il ne m’avait jamais rien fait personnellement. »

Un aveu direct, appuyé par une posture corporelle sobre, presque confessionnelle. L’artiste insiste sur le fait qu’il n’était pas dans son état normal au moment des faits. Pour certains, ces mots marquent un acte de maturité et d’humilité. Pour d’autres, ils sonnent comme une rétractation orchestrée.

Une opinion publique profondément divisée

Depuis la diffusion de la vidéo, les réseaux sociaux se sont enflammés. Si une partie des internautes se dit touchée par la vulnérabilité du rappeur et salue son chemin de guérison, d’autres crient à la manipulation politique.

Le mouvement #LibérezAamron, très actif depuis son arrestation, évoque une mise en scène dictée sous la contrainte. Plusieurs activistes en exil dénoncent une stratégie du pouvoir pour faire taire les voix dissidentes.

Aamron tente de rassurer : « Ce n’est pas un discours dicté »

Face aux soupçons croissants, l’artiste a tenu à s’expliquer dans la même vidéo :

« Mon arrestation n’était pas arbitraire. Il y a eu infraction. Et je suis traité avec respect au centre. »
« Personne ne m’a forcé à parler. Je parle avec un esprit plus apaisé aujourd’hui. »

Mais cette déclaration suffira-t-elle à convaincre ceux qui doutent encore de sa liberté d’expression ?

À lire aussi : Togo : Le rappeur engagé Amron arrêté de nuit à son domicile — la société civile dénonce un « kidnapping d’État »

Artistes et engagement politique au Togo : un climat de plus en plus tendu

L’affaire Aamron dépasse le cas individuel. Elle pose une question plus large : quelle est la place de l’artiste engagé dans un pays comme le Togo ?

Peut-on encore dénoncer les injustices sans crainte d’être muselé ? L’espace d’expression libre semble se réduire. Cette affaire risque d’avoir un effet dissuasif sur d’autres artistes ou influenceurs critiques du régime.

Un avenir artistique suspendu à de nombreuses inconnues

Alors qu’il poursuit son traitement au centre psychiatrique de Zébé, Aamron reste dans l’incertitude. Reviendra-t-il sur la scène artistique avec un nouveau message ? Le public acceptera-t-il son changement de ton ? Ou sera-t-il définitivement associé à cette affaire ?

Quoi qu’il en soit, cette sortie marque un tournant symbolique dans les rapports entre jeunesse contestataire et pouvoir exécutif togolais.

Conclusion : un mea culpa qui ouvre un débat national

Plus qu’une simple vidéo d’excuse, l’intervention d’Aamron agit comme un miroir pour la société togolaise. Elle met en lumière des fractures profondes : entre liberté d’expression et limites juridiques, entre trouble psychique et responsabilité, entre sincérité et soupçon.

Le feuilleton est peut-être loin d’être terminé.

Rédaction : Dunia News
Togo, juin 2025

Partager cet article

Recherche en direct

Catégories

Autres publications

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Activer les notifications Accepter Non, merci