Mysticisme et crime : les vigiles des “Diamantines” trahis par leurs appels à des marabouts

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Mysticisme et crime : les vigiles des “Diamantines” trahis par leurs appels à des marabouts

Par Imam chroniqueur Babacar Diop

L’affaire du viol collectif survenu dans la luxueuse résidence « Les Diamantines », sur la route de Nguerigne près de Saly, prend une tournure aussi troublante qu’inattendue. Quatre vigiles, initialement suspectés dans cette affaire de cambriolage et de viol, ont été placés sous mandat de dépôt après la découverte d’un élément déterminant : leurs appels à des marabouts pour des « prières mystiques » destinées à entraver le cours de la justice.

Des faits d’une nuit d’horreur

Dans la nuit du 5 au 6 août dernier, un groupe d’une dizaine d’individus armés avait fait irruption dans la résidence. Après avoir neutralisé et ligoté les gardiens, les malfaiteurs s’étaient introduits dans la villa de l’architecte béninoise Lydia Assani, alors absente. Sa fille adoptive, âgée de 28 ans, a été victime d’un viol collectif. Les assaillants ont emporté bijoux, numéraires estimés à dix millions de francs CFA, ainsi que le véhicule de la victime, retrouvé plus tard à Nguékhokh.

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Une enquête relancée par les téléphones

Longtemps au point mort, l’enquête menée par la Brigade de recherches de Saly-Portudal a connu un tournant décisif grâce à l’exploitation des communications téléphoniques des gardiens. Les enquêteurs ont découvert que plusieurs d’entre eux avaient contacté des marabouts peu après le drame. Objectif : solliciter des prières pour échapper à la justice et brouiller les pistes de l’enquête.

Ces appels ont trahi les suspects, conduisant à leur interpellation et à leur inculpation pour complicité, association de malfaiteurs, vol à main armée avec usage de moyen de transport et viol collectif. L’un des vigiles, qui avait pris la fuite vers son village natal, a été arrêté grâce à un mandat d’arrêt émis à son encontre.

Le recours mystique, entre croyance et délit

Ce recours à la dimension mystique, dans une affaire de crime aussi grave, relance le débat sur la place des pratiques occultes dans certaines stratégies de dissimulation criminelle. Comme le rappelle le sociologue sénégalais Dr. Abdoulaye Fall, auteur de Croyances et déviances sociales au Sénégal (L’Harmattan, 2019, p. 134), « le maraboutisme n’est pas en soi un problème ; c’est son instrumentalisation à des fins d’impunité qui devient un danger social ».

De même, l’islamologue Cheikh Mouhamed Lamine Kébé souligne dans Foi, justice et société au Sénégal (Éditions Khoudra, 2021, p. 87) que « chercher refuge dans le mysticisme pour échapper à la justice humaine, c’est nier à la fois la foi véritable et le sens moral ».

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Un enjeu de société et de justice

L’affaire des « Diamantines » met en lumière une double fracture : d’un côté, la criminalité violente et organisée ; de l’autre, une croyance persistante en la puissance des pratiques mystiques pour influencer la justice. Entre superstition et stratégie, ces dérives montrent combien la lutte contre l’insécurité doit aussi s’accompagner d’un travail de conscientisation spirituelle et morale.

Comme le disait Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur du mouridisme : « Le vrai remède à l’injustice, c’est la sincérité du cœur et la pureté des actes ».

Les suspects attendent désormais leur jugement, tandis que l’enquête se poursuit pour identifier les autres membres du commando encore en fuite.

Imam chroniqueur
Babacar Diop

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